Simon Balloud, Université de Saint-Boniface

Selon plusieurs études relatives aux relations franco-canadiennes (Yon, 1965), à l’immigration française au Canada (Savard, 1970 ; Linteau et al., 2017) et à l’anarchisme au Québec (Nestor, 2001-2003 ; Houle-Courcelles, 2008), le Québec aurait été une terre d’exil pour quelques milliers de communards français à partir de 1871. Or, selon notre enquête – toujours en cours –, aucune preuve documentaire ne permet d’étayer l’existence d’un tel mouvement migratoire. L’arrivée massive d’immigrants français au Canada au début des années 1870 est sans doute bien davantage due au phénomène d’exode rural alors en cours en France (Démier, 2005). Plusieurs indices semblent plutôt démontrer que la présence de communards ne se résume qu’à une poignée d’individus à Montréal et à Québec.

Dès lors, comment expliquer la perpétuation d’une telle affirmation dans l’historiographie québécoise ? Celle-ci trouve son origine dans un discours fondé autour du communard comme figure-repoussoir. Cette représentation est construite et diffusée à des fins politiques, notamment lors de conflits sociaux à l’instar de la grève ouvrière de juin 1878 à Québec (Mathieu, 2012). Mais le spectre communard est également mobilisé par une partie de la presse et des élites politico-religieuses pour critiquer l’immigration française au Canada (son organisation et ses recrues) dans un contexte de méfiance, voire d’hostilité vis-à-vis de l’émergence d’une France républicaine (Harvey, 2008).

Ainsi, nous proposons d’étudier non pas un événement, la Commune de Paris, mais ses échos au

Québec sur un double plan historique et historiographique.