Renaud Vimond, Université du Québec à Trois-Rivières
Entre les deux lois péquistes sur le « financement des partis politiques » en 1977 et sur le « lobbyisme » en 2002, la manière d’appréhender la relation entre intérêts publics et privés au Québec a beaucoup évolué. L’analyse des débats parlementaires montre comment la question de l’indépendance des titulaires de charges publiques a été progressivement reformulée : d’abord éminemment politique, autour de l’effet de l’argent et des tactiques d’influence sur les partis politiques québécois, l’enjeu se transforme après 1990 en un problème plus étroit de déontologie, alors que les métiers de l’influence se professionnalisent autour du personnage du « lobbyiste ».
Mon analyse du discours parlementaire réunit l’histoire politique et la sociologie des problèmes publics. L’étude en série de ces « événements » ponctuels et très contextualisés que sont les débats parlementaires permet de raconter une histoire en deux temps : le débat autour de la loi de 1977, qui relance le problème politique du pouvoir de l’argent puis, entre 1997 et 2002, la reformulation en profondeur du problème en termes de « lobbyisme ». J’exposerai comment les différents intervenants du débat parlementaire, tant les politiques que les acteurs issus de la société civile, ont été des agents actifs de l’évolution de la relation entre intérêt public et intérêt privé, de sa mise à l’agenda parlementaire et de l’adoption de nouvelles définitions et solutions politiques, sans qu’ils n’aient pour autant eu pleinement conscience de cette évolution.