Shawn McCutcheon, Université McGill

Entre 1790 et 1830, l’éducation classique des garçons au Bas-Canada n’échappa pas à l’influence des évènements révolutionnaires européens. En effet, la Révolution française marqua les esprits des maîtres et des élèves, tout en ayant un impact sur la nature et les objectifs des contenus éducatifs. Du côté franco-catholique, l’influence des prêtres fuyant la France se fit particulièrement sentir à Montréal. Les Sulpiciens émigrés y contribuèrent à l’essor d’une pensée contre-révolutionnaire. Chez les angloprotestants, les écoles de Québec et de Montréal furent fondées par des hommes ayant reçu une éducation infusée de patriotisme britannique aux universités de Cambridge, de Glasgow et d’Aberdeen.

Dans les contenus éducatifs eux-mêmes, la Révolution et ses conséquences apparaissent régulièrement afin de mieux les condamner. À travers les discours didactiques, la volonté de contrer l’idéologie révolutionnaire se traduisit par une insistance accrue sur le devoir de loyauté envers la Couronne, d’obéissance aux autorités constituées et le rejet du républicanisme. Ultimement, une instruction classique basée sur deux traditions intellectuelles différentes émerge. Justifiant la fidélité à la Couronne de façon contrastée, toutes deux avaient comme soucis de former le sujet loyal à partir d’idéaux virils patriciens valorisant la maîtrise des passions. Dans les collèges, la fidélité était comprise à travers la notion d’obéissance sacrée. Le philosophe démagogue y apparaissait comme contre-figure masculine opposée à celle de l’honnête homme catholique. Dans les institutions anglo-protestantes, l’idée de « loyauté raisonnée » s’ancrait dans un discours hérité de la philosophie morale écossaise ou constitutionnaliste. L’orateur républicain s’y opposait à la figure du gentilhomme.