Sandrine Hallion, Université de Saint-Boniface

Au début du 20e siècle, Jean-Louis Picton, un cultivateur savoyard de la commune de Jarrier en Moyenne-Maurienne, demande à son beau-frère d’aller explorer les possibilités d’une émigration au Canada. Au printemps 1904, ce dernier se joint à un groupe de 25 Jarriens qui part pour le Manitoba. Ayant engagé des fonds pour l’achat d’une terre à Haywood, dans la région de la Montagne Pembina au Manitoba, Jean-Louis Picton, son épouse et leurs cinq enfants arrivent au Canada au printemps 1905 pour s’y établir. Dans « Mémoire d’une émigration », Picton raconte son projet et ses préparatifs de départ, son arrivée au Canada, son installation à Haywood et les huit premières années qu’il y passe. Ce manuscrit est un évènement discursif, expression que je définirai de manière littérale comme l’avènement d’un discours, ici mémoriel. Le manuscrit est aussi un discours sur l’événement qu’est l’émigration, le choix de la mobilité. Je propose d’explorer ces deux facettes du récit de Jean-Louis Picton en m’intéressant, tour à tour, à l’individu producteur de discours et à la teneur du discours qu’il lègue. En somme, je cherche à cerner « de qui est la mémoire » et « de quoi y a-t-il souvenir ? ».