Simon Balloud, Université de Saint-Boniface

Entre 1883 et 1911, 18 communautés religieuses françaises s’implantent dans l’Ouest canadien, notamment dans la Prairie, pour assumer l’encadrement clérical des diverses populations locales et travailler à la mise en place de services d’éducation, de santé et d’assistance. Cette première fondation au Canada est pour chacune d’entre elles un événement majeur qui s’inscrit dans une longue histoire communautaire dont l’origine repose déjà sur une fondation, celle de la congrégation elle-même. Dominée par la figure du fondateur ou de la fondatrice, cette genèse devient événement à la suite de sa mise en récit afin d’être transmise de génération en génération en vue de construire une mémoire commune. En prenant appui sur un riche corpus documentaire issu des archives des Sœurs de l’Enfant- Jésus (Coquitlam) et des Filles de la Croix (Saint- Boniface), nous démontrerons que cette genèse puise largement dans les récits de voyage et de fondation des religieux, car la mobilité dont ils rendent compte parle biais de stratégies d’écriture est la plus à même de traduire la rupture qui opère lors du voyage vers le Canada, à savoir l’avènement d’un avant et d’un après essentiels à la fabrication de l’événement et de sa mémoire.