Eric Fillion, postdoctorant, Université de Toronto

L’été 1970 s’annonce chaud au Québec avec la tenue prochaine d’une série de festivals de musique inspirés du déjà mythique Woodstock Music & Art Fair. Le festival pop, avec ses débordements et son lot de plaisirs, est un phénomène qui suscite beaucoup d’inquiétude. Jérôme Choquette, ministre de la Justice, se veut d’abord rassurant lorsqu’il affirme que ce type d’événement n’est pas nécessairement nocif, car il « correspond au mouvement d’émancipation de la jeunesse ». Une opposition féroce s’élève néanmoins et perdure tout au long de l’été, avec comme conséquence l’annulation du Festival Express à Montréal, l’échec du Woodstock Pop Festival de Manseau et l’interdiction du Festival de Sainte-Croix.

Quant au « festival pop anti-capitaliste » de Val-David, celui-ci a lieu dans la clandestinité (et donc sous surveillance policière). Que nous révèlent ces non-événements sur les luttes sociales et politiques qui se (re)dessinent et se (re)structurent au sein de la sphère publique culturelle au lendemain des années 68 et à l’aube d’Octobre? L’étude de ce phénomène est ici l’occasion de situer l’émergence d’une nouvelle jeunesse citoyenne dans son rapport au pouvoir alors que le Québec bascule dans les longues et dissonantes années 1970.